Stress de pré-rentrée : du naturel au problématique.
Tous les enfants ont une petite appréhension avant chaque rentrée et elle est parfaitement naturelle, mais parfois cela peut donner lieu à de véritables crises d’angoisses. La science à beaucoup étudié ce phénomène et si chez certains, lorsque c’est plus profond, plus intense ou plus présent, c’est parfois labellisé comme du stress ou de l’angoisse, il est important de l’envisager comme ayant des origines diverses à explorer. En France, des auteurs comme Florence Mariné et Claude Bouchard (2007) ont montré que la rentrée représente un moment critique de transition, souvent chargé d'angoisses. Les enfants doivent s'adapter à de nouvelles classes, enseignants, voire de nouveaux camarades, ce qui génère une incertitude.
Le modèle transactionnel du stress et du coping de Lazarus & Folkman, (1984), actualisé dans les recherches de Compas et al. (2017), est également utilisé en France pour comprendre comment les enfants réagissent aux nouvelles situations scolaires. Selon ce modèle, un enfant qui perçoit la rentrée comme une menace, plutôt qu'un challenge ou une nouveauté attendue, est plus susceptible de ressentir de l’anxiété.
Un niveau de stress modéré est normal à l'approche de la rentrée, mais lorsqu'il devient excessif, il peut signaler un trouble anxieux. Des ouvrages en France, comme celui de Stéphanie Maillochon et Olivier Revol (2015), montrent que les enfants peuvent développer des symptômes somatiques tels que maux de ventre, insomnie, ou même refus d’aller à l’école. Ces manifestations traduisent un stress plus profond qui dépasse l'anxiété anticipatoire.
Selon Hale, Raaijmakers et Meeus (2009), des niveaux élevés d’anxiété prolongée avant la rentrée peuvent conduire, dans les cas les plus sévères à des phobies scolaires ou des troubles dépressifs. Les recherches françaises confirment également cette tendance. Revol (2015) a souligné l’importance de la prévention précoce pour éviter que ces troubles ne deviennent chroniques. En outre, des études françaises ont montré l'importance de « préparer » les enfants à l'avance pour réduire ce stress (Mariné & Bouchard, 2007).
Le rôle des parents est prépondérant à deux niveaux, ils peuvent, sans non plus en faire une réunion de famille formelle pour ne pas renforcer un état qu’il faut justement chercher à banaliser, discuter des attentes de la rentrée avec l’enfant et lui permettre d'exprimer ses craintes ou ses ressentis (ce mot m’agace un peu, mais il a du sens dans ce contexte). Il peut être intéressant d’insister sur le fait que tous ses camarades ont aussi de l’appréhension pour cette nouvelle année et il peut être utile dans certains cas d’indiquer sans forcément les détailler qu’il y a différents degrés et que certains sont plus inquiets que d’autres. Ne pas trop détailler pour ne rien leur mettre dans la tête, certains enfants pourraient en effet se demander pourquoi tel camarade serait beaucoup plus inquiet comparé à lui et s’il pourrait, en fait, avoir une bonne raison de l’être, à laquelle, lui, ne pense pas…
En fonction des manifestations, il est important de prendre le temps de tout explorer dans un climat familial de confiance, d’écoute et de bienveillance, pour tenter de libérer la parole et pour s’assurer, aussi, que cet état émotionnel n’est pas produit par un climat social particulier avec ses camarades ou d’autres événements passés, jusqu’à ceux que l’on redoute tous.
Pour pallier toute chronicité, les parents doivent être attentifs aux symptômes persistants de leur enfant et, si nécessaire, consulter un spécialiste. Les interventions précoces, notamment en psychologie scolaire, sont primordiales pour prévenir l’aggravation des troubles anxieux qui pourrait finir par dépasser le seul cadre de la pré-rentrée.
Références :
- Mariné, F., & Bouchard, C. (2007). L’anxiété de rentrée chez les enfants du primaire : Étude longitudinale des comportements adaptatifs. Revue Française de Pédagogie, 158, 45-58.
- Compas, B. E., Jaser, S. S., Dunbar, J. P., Watson, K. H., Bettis, A. H., Gruhn, M. A., & Williams, E. (2017). Coping and emotion regulation from childhood to early adulthood: Points of convergence and divergence. Australian Journal of Psychology, 69(2), 108-117.
- Maillochon, S., & Revol, O. (2015). Le stress scolaire : Facteurs de risque et stratégies de prévention chez les enfants en milieu éducatif. Neuropsychiatrie de l'Enfance et de l'Adolescence, 63(8), 509-516.
- Hale, W. W., Raaijmakers, Q. A. W., & Meeus, W. H. J. (2009). Anxiety and depression development in adolescents. Journal of Abnormal Child Psychology, 37(3), 381-389.